fire meets gasoline. (brenna)

Tu sors des cartons du coffre de la voiture, des cartons pleins d'une excellente sélection des meilleures bouteilles Fairchild. Il est tôt. Kenna Blackwell t'as passé une grosse commande, vous avez conclus un contrat plutôt intéressant toutes les deux. T'as accepté parce que tu refuses jamais un gros client et qu'elle t'a commandé une quantité plutôt... plutôt honnête, faut le dire. T'as dit que tu viendrais l'aider à mettre ça en place. Tu tiens à ce que les choses soient bien faits. Tu veux que ta marque ait une bonne visibilité, aussi t'as proposé à Kenna de former son barman pour quelques cocktails spéciaux que vous avez concocté spécialement. Ce soir pendant l'événement qu'elle organise, il y aura du beau monde et tu veux que la production familiale fasse bonne figure. Tu veux que les gens se délectent, qu'ils disent " mais c'est délicieux ! quel est donc ce whisky? " c'est important pour toi, et puis c'est important pour elle aussi. Elle ne veut pas que ses invités boivent de la merde et elle a bien raison, sur ça, t'es totalement d'accord avec elle. T'entreposes plusieurs cartons sur un diable que tu tires jusqu'à l'entrée de ce vieil entrepôt, il a été réhabilité, maintenant il permet d'organiser de belles sauteries, tu doutes pas que l'événement de Kenna sera quelque chose de mémorable. T'arrives jusqu'à elle, t'ouvres un des cartons pour lui montrer une bouteille.
- Celui-là, c'est pour les cocktails, l'autre, que je vais te montrer, c'est sec. On le mélange pas. J'expliquerais ça à ton barman...
Tu soulèves le carton pour le poser et ouvrir celui du dessous, quand tu te relèves tu te sens pas très bien. T'as la tête qui tourne et la vue qui se brouille, tu sens ta gorge qui se serre. T'as froid. Puis t'as chaud. En quelques secondes tu sens ton corps te lâcher un peu. Tu regardes Kenna, puis tu t'éloignes, t'arrives à atteindre les toilettes non sans manquer de te vautrer. Quand t'arrives au-dessus de la cuvette ça sort instinctivement. La nausée remonte, tu vomis, t'as les larmes qui te montent aux yeux. Tu te relèves quand tu commences à te sentir un peu mieux. Tu te dis, putain, de merde, fallait que ça arrive maintenant? Qu'est-ce qui t'arrives au juste ? Pourquoi avec elle? Putain l'enfer. Tu sors de la cabine pour te rincer la bouche, évidemment, Kenna se tient dans l'encadrement de la porte. Elle aurait loupé ça pour rien au monde hein, te voir dégueuler de bon matin... Tu bois un peu d'eau, inspecte ton reflet, t'as repris un peu des couleurs, tu corriges le mascara qui a légèrement coulé et tu te tournes vers elle.
- J'crois que j'ai fait une chute de tension, c'est rien, on peut retourner bosser... tu dis.

Tu ne laisses jamais rien au hasard, c’est dans ta nature. Que ce soit dans ta vie de tous les jours ou au travail, il n’était pas question de laisser quoique ce soit au hasard, jamais. Etant chargé de la communication et de la bonne image de l’entreprise familiale, tu étais celle qui chapeautait et avait le dernier mot sur tous les événements que vous organisiez, notamment. Tes choix et tes ordres avaient valeur de loi, ni plus ni moins et, à moins que ce soit une remarque pertinente, tu n’aimais pas qu’on remette en cause ton jugement. Tu étais ferme, mais tu étais toujours juste. Ton principal intérêt était celui de l’entreprise, pas le temps. Tu avais à cœur de toujours bien faire les choses.

Parfois, ça passait par faire des choses que tu n’aurais pas voulu faire en temps normal. Comme de passer une commande auprès d’une personne que tu ne pouvais pas voir en peinture. Ce qui était présentement le cas. Tu avais contacté Brionny Fairchild pour alimenter ton événement avec ses spiritueux. Parce que tu savais que les produits Fairchild allait ravir tes clients et ce qui pouvaient les ravir n’étaient que du bonus pour toi. Alors tu avais pris sur toi et tu avais contacté celle qui te privait notamment de ton frère depuis tellement d’années déjà. Mais ce genre de commentaires n’avait pas de prise sur le monde du travail pour toi. Donc tu avais mis de côté ton animosité et tu avais prévu d’être la plus professionnelle et efficace possible. Comme toujours.

Brionny était donc arrivée ce matin-là, apportant avec elle les cartons nécessaires au bon approvisionnement de la soirée. Tu hoches la tête d’un air satisfait à ses explications, ton Ipad au creux du bras, le stylet dans l’autre.

« A vrai dire, on a trois bars différents et donc trois barmen mais ils seront tous là pour le briefing. »

Tu ajoutes quelques notes sur ta tablette lorsque tu te rends compte que quelque chose cloche chez Brionny. Elle a l’air pâle, sur le point de tourner de l’œil, ou de vomir, ou les deux. Tu ouvres la bouche pour dire quelque chose mais voilà déjà qu’elle a tourné les talons. Fronçant les sourcils, tu la suis, faisant claquer tes talons sur le parquet vernis. Tes méninges fonctionnent à mille à l’heure alors que les bruits de vomissement te parviennent depuis le seuil. Tu fermes les yeux une seconde, tu ne supportes pas le vomi, tu n’as jamais pu alors tu fais en sorte de bien t’ancrer dans tes bottes avant de pénétrer dans les toilettes. Elle a l’air de croire que tu prends un malin plaisir à être ici. Quelle erreur.

« Baisse de tension ou nausées matinales ? »

Un tic nerveux agite ta mâchoire alors que tu croises les bras sous ta poitrine. Les rouages de ton cerveau étaient encore en pleine action. Les conséquences d’une telle situation étaient… tu n’osais même pas imaginer tout ce que cela pourrait impliquer, aux vues de toutes les circonstances.

Tu regardes dans ton sac à main pour en sortir un chewing-gum, tu le mets en bouche, t'aurais préféré de brosser les dents mais bon. Tu te sens encore un peu patraque, pas trop bien dans ton corps, et la présence de Kenna en face de toi, sûrement entrain de te juger n'arrange rien. Tu te caches derrière une chute de tension, et c'est bien ce que tu crois que c'est. Le café de ce matin n'a sans doute pas suffit, t'étais tellement dans le rush. Et bim. Mais Kenna, elle voit autre chose, elle te demande. Baisse de tension ou nausée matinale. T'écarquilles les yeux en la regardant, t'as même pas pensé à cette option, pas vraiment, et tu te sens totalement paniquer, perdre le peu de contrôle que t'avais. Relax Brionny, t'es pas enceinte putain, c'est pas possible.
- Quoi ? tu fais, encore sur le cul.
Putain manquerait plus que Kenna pense que t'es enceinte. Mais peut-être que t'es enceinte ? Qu'est-ce que t'en sais ? Tu te rappelles de quand date ton dernier cycle menstruelle ? Est-ce que c'est possible ? T'essayes de balayer toutes ces questions de ton esprit mais c'est trop tard, l'idée d'être enceinte t'angoisses déjà.
- Non, sûrement pas... Ce n'est pas possible, déclares-tu, t'es pas vraiment sûre de toi, t'es pas vraiment convaincante. Tu te demandes si tu devrais pas faire un test de grossesse. Peut-être que Kenna a raison ? Peut-être que c'est bel et bien une putain de nausée matinale ? Putain l'enfer, manquerait plus que ça, c'est bien la dernière chose dont t'aurais envie. Comment tu ferais en plus ? Julian est absolument pas près pour ça. Peut-être que tu devrais avorter ? Peut-être sans que Julian soit au courant. Mais dans ce cas faudrait persuader Kenna que tu n'es pas enceinte histoire qu'elle n'aille pas le balancer à qui que ce soit. Putain. T'es totalement paumée pendant quelques secondes, mais tu te ressaisis. C'est pas le moment de faire un test de grossesse ni de discuter de ta baby shower avec Kenna Blackwell, plutôt mourir putain.
- Non, j'suis pas enceinte, me regarde pas comme ça... tu soupires, reprenons le boulot, ok ?
Tu regardes l'heure et c'est l'heure d'une bonne nausée matinale, c'est ça que tu te dis. Tu ramasses ton sac à main, et te diriges vers la porte pour rejoindre Kenna.
- J'espère que je peux compter sur ta discrétion ? tu lui demandes, t'as l'air profondément inquiète et tu détestes qu'elle te voit comme ça. En vrai t'as envie de pleurer car t'angoisses, ça ne respecte absolument pas tes plans, t'as pas envie d'un gamin maintenant, vous n'en avez même jamais trop parlé avec Julian, en tout cas vous n'envisagiez pas ça maintenant. Allez, ce n'est qu'une petite chute de tension, rien de plus.
- On peut se prendre un café en attendant que les barmans arrivent ?

Brionny a l’air proprement ulcéré de ton affirmation, comme si elle n’y avait pas pensé une seule seconde ; ce qui devait être le cas. Mais tu voyais bien qu’à présent, elle avait de sérieux doute, tu avais l’impression de voir ricocher les questions dans sa boîte crânienne. C’est fou comme le choc pouvait rendre les gens très expressifs, bien qu’il ne décroche pas un mot. Pourtant tu serres les mâchoires. Une hypothétique grossesse, ce n’est pas une bonne nouvelle. Pas une bonne nouvelle du tout, du tout. Non parce que tu détestes Brionny. Ce n’est un secret pour personne que tu ne la portes pas dans ton cœur, très loin de là d’ailleurs et le sentiment est réciproque. Tu as plus d’une raison pour ne pas l’apprécier, raison que tu te gardes bien d’aborder à l’heure actuelle. Mais ce n’est pas ce qui te pousse à te tendre, à te redouter. Clairement, tu as toujours été plutôt soulagée que ton frère ne lui ai pas encore passé la bague au doigt. Mais aux vues de ce que tu avais appris il y a peu… non, un bébé serait la plus grosse connerie qu’il pourrait se produire en ce moment dans ce prétendu couple. Dans un sens, ça te rassurait que Brionny panique mais elle était loin de se douter du réel motif de ta propre réaction.
« T’as pas l’air plus convaincue que ça mais bon. »

Elle propose de reprendre le boulot et tu hoches la tête. Tu n’as pas envie de t’attarder sur le sujet outre mesure. Tu n’aimais pas du tout ce sentiment qui était en train de s’aventurer dans tes entrailles, surtout que tu n’en étais absolument pas responsable. Tu n’étais qu’un satané dommage collatéral dans les conneries de ton frère, et tu n’aimais pas ça. Tu n’aimais pas ça du tout. Lorsqu’elle demande ta discrétion, tu lui glisses un regard en coin.

« Contrairement à ce que tu sembles croire, je ne ferais jamais quelque chose qui puisse délibérément nuire à ma famille. Et ça s’étend bien évidemment à Julian. »

Tu ne le lui admettrais pas mais elle avait l’air assez dépité pour que tu décides qu’un cessez-le-feu serait la stratégie la plus raisonnable, surtout que vous étiez toujours en pleine collaboration, cela prenait le pas sur le reste à l’heure actuelle. Mais tu n’aimais pas l’idée d’avoir sur la conscience à la fois le secret de Julian et celui de Brionny. Ce couple commençait sérieusement à trop s’immiscer dans ta vie.
Tu consultes ta montre, ils ne seraient pas là avant encore un bon quart d’heure alors le café serait une excellente idée. Tu la conduis à nouveau en direction de la salle principale avant de te glisser derrière l’un des bars, celui derrière lequel s’abrite une grande machine à café rutilante. Tu en profites pour lancer la bouilloire tout en demandant à Brionny quel type de café elle veut boire.

« Rien de trop poussé, le maximum que je puisse faire c’est un latte. » Tu saisis deux tasses sous le comptoir, ainsi que des touillettes lorsque, n’y tenant plus, te retournes pour planter tes yeux dans les siens et tu lances : « Tu n’es pas obligé de le garder si tu n’en veux pas, tu sais, le cas échéant. »
Toi et ta fichue franchise.

Tu vois sur le visage de Kenna qu'elle n'est pas absolument pas convaincue par ce que tu peux lui dire. Au contraire, elle se sent même offensée que t'oses insinuer qu'elle puisse ne pas faire preuve de discussion, ça te fait lever les yeux au ciel, tu peux pas dire que Kenna ait été pour toi un exemple de belle-soeur et qu'elle t'ait spécialement bien accueillie dans la famille Blackwell depuis que t'es avec Julian. Alors tu te permets de douter de sa bienveillance.
Tu la suis jusqu'à un des bars, elle vient s'improviser barista mais pas trop non plus, elle t'avoue que ses compétences avec une machine à café professionnelle se limite au latté. Tu hausses les épaules.
- Un grand café ça m'ira très bien, t'embêtes pas, tu souffles.
T'es occupée à regarder le packaging d'une bouteille posée sur le bar lorsque Kenna se tourne vers toi à nouveau, et elle te lâche comme une bombe, c'pas un cheveux sur la soupe là c'est carrément une perruque qu'elle te met dans le café. Tu n'es pas obligée de le garder, si tu n'en veux pas. Tu la regardes, tu lui coules un regard méprisant, tu commences à te mettre en colère. Pour qui se prend-t-elle pour se permettre de te dire ce que tu devrais faire ou non avec un gamin ? Elle est totalement folle.
- Pardon ? tu demandes sans vraiment demander, évidemment. Tu te demandes quand même si t'as bien entendu.
- Franchement, Kenna... Tu te fiches pas mal que je le veuille ou non, tu ne veux juste pas que ce soit celui de Julian.
Tu souris légèrement. Tu sais que t'as raison, Kenna elle ne veut sans doute pas que son frère ait pu avoir le malheur de te faire un gosse. Elle doit prier chaque soir le jour où votre relation se terminera et où Julian pourra ENFIN revenir dans les rangs pour être un Blackwell digne de ce nom.
- Je n'ai pas de conseils à recevoir de quelqu'un qui accepte de laisser le choix de son époux entre les mains de ses parents, mais ne t'inquiète pas, je n'ai pas prévu de devenir mère de sitôt. Félicitations d'ailleurs, pour ton mariage.
Tu l'observes, un peu amusée.

Tu fais claquer la tasse sur le comptoir alors que tu la fais claquer avec humeur. Voilà un parfait rappel pourquoi tu ne pouvais pas voir Brionny Fairchild en peinture. Elle était... trop émotionnellement instable, montant constamment sur ses grands chevaux, ce qui avait le don de t'agacer prodigieusement. Est-ce qu'elle avait besoin d'être toujours inconstante comme cela ou est-ce qu'elle faisait exprès d'être insupportablement versatile ? Tu la soupçonnais de faire grandement exprès. Ou pas. Ou alors c'était cette prétendue grossesse. Comme si tu en avais quelque chose à faire, honnêtement.

« Je te conseille vivement de descendre de tes grands chevaux avant que je perde patience, Fairchild. Il n'y a qu'une personne particulièrement incertaine pour faire passer un simple constat pour du jugement. Je te pensais moins instable que ça, il faut croire que je t'ai accordé bien trop de crédit. Ne crois pas que parce l'on collabore que je vais tolérer ton ton une seconde de plus alors je te conseille de bien réfléchir à ce que tu vas dire à l'avenir. »

Tu arques un sourcil avant de partir d'un rire franc et sincèrement amusé. Tu t'adosses au plan de travail en te tenant le ventre tellement tu ris et les larmes ne tardent pas à te monter aux yeux. Elle croyait avoir appuyé sur un sujet sensible mais elle était encore loin du compte, très loin du compte.

« Attends, tu crois que je vais chouiner parce que je dois épouser Wayne ? J'ai choisi de faire ce qu'il fallait pour ma famille, je vais joindre l'utile à l'agréable. Pourquoi est-ce que je me plaindrais ? Ne projette pas tes ambitions de vieille fille sur moi s'il te plaît... 7 ans, c'est ça ? Et toujours rien... ouille... »

Tu prends un air faussement désolé que ton sourire cruel et tes yeux démentent. Elle avait voulu jouer mais si elle voulait jouer alors vous pouviez être deux. Ou alors vous pourriez vous remettre à travailler bien tranquillement. Avant que tu ne perdes patience et ne lui balance à la gueule ce que ton lâche de frère n'osait pas avouer. Tu n'avais pas envie de t'en mêler mais si elle te cherchait vraiment, elle allait te trouver.

« Est-ce que tu es prête à te comporter à nouveau en professionnel ou est-ce qu'il faut que je briefe mes barmen toute seule ? »

Tu déposes sèchement sa tasse de café devant elle et plante ton regard sans détour dans le sien.

Kenna est d'une humeur massacrante, loin de se laisser marcher dessus, elle réagit au quart de tour, bien qu'elle feinte de ne pas te prendre au sérieux, qu'elle se mette à rire. Tu connais très bien ce genre de réactions, tu les pratiques quotidiennement. Le mépris dont elle fait preuve n'a d'égal que son côté détestable. Je te conseille, dit-elle, blablabla, tu n'écoutes pas la moitié, tu n'as aucun conseil à recevoir de Kenna Blackwell, reine de garces qui pense tout savoir sur tout et qui se croit bien placer pour te conseiller sur une grossesse imaginaire. Elle t'attaque directement, dit que tu es instable, blablabla, je te conseille, encore. Putain, faut vraiment qu'elle arrête de vouloir te conseiller celle-là. Tu roules des yeux.
- Kenna, ça vaut pour toi aussi, "je te conseille", fais-tu en l'imitant, de ne pas te mêler de mon utérus et du fruit de notre amour à Julian et moi, tu dis, franchement sarcastique.
Elle s'étend sur son mariage, la masquarade avec Wayne, il est venu te trouver pour t'en parler, pour te dire que ça le rendait dingue de devoir se marier avec elle, et ça te fait sourire de la voir nier l'évidence. Joindre l'utile à l'agréable. Quelle blague. Ses parents lui avaient bien nettoyé le cerveau, c'était du brainwashing digne des Blackwell, malheureusement elle n'avait pas la force de caractère de son frère pour ne pas se laisser dicter les choses par maman. Pauvre fille. Evidemment, elle t'attaque à nouveau, vieille fille toi ? Car après sept ans, toujours rien avec Julian ? Tu arques un sourcil à ton tour avant de te marrer. Putain, elle a vraiment un grain.
- Et après c'est moi qui suis folle, j'hallucine... Tu crois que j'attends désespéremment que ton frère veuille me mettre la bague au doigt ? Mon Dieu mais tu délires, ma pauvre... Je préfère attendre dix ans de plus plutôt que de me marier parce que c'est "utile"...
Quelle dingue.
Tu bois de ton café et tu te lèves alors qu'elle te demande si tu comptes redevenir professionnelle ou si elle va devoir faire ton boulot à ta place, encore une preuve de son mépris sans nom. Enfin, ça n'a rien d'étonnant, elle se pense tellement supérieure.
- T'inquiète pas, je ferais mon boulot, je ne vais pas laisser tes barmen entre les mains d'une débutante, tu n'y connais rien en cocktail de toute évidence, tu ne sais même pas utiliser une machine à café,  sourire hypocrite. Tu trouves presque ce petit affrontement revigorant, Kenna Blackwell a le don de t'agacer mais son mépris ne t'atteint pas vraiment. Elle se fait des illusions, elle se trompe sur toute la ligne. Elle croit tout savoir.

« Alors on joue à ça ? C’est celui qui l’a dit qui l’est ? »

Tu pars d’un rire dont est dénué toute joie. Est-ce qu’elle ne se rendait pas compte à quel point elle était ridicule à jouer les hystériques ? Tu attendais bien mieux d’elle lorsque tu l’avais contacté pour ce partenariat. Mais une chose était sûre, tu ne ferais pas deux fois la même erreur. Vous deux dans la même pièce, c’était juste impossible. Et même quand tu faisais l’effort d’être professionnelle, elle trouvait le moyen de tout foutre en l’air. Tu n’étais clairement pas du genre à accorder de deuxième chance, surtout pas à quelqu’un comme elle.

« Je m’en contrefous en fait, moi je suis ici pour travailler. Pas pour dégueuler mes tripes ou emmerder les gens avec qui je collabore. Mais il faut croire qu’on n’a pas la même définition d’être professionnel. La prochaine fois, rends-nous service à toutes les deux et délègue, je n’ai clairement pas envie de perdre à nouveau mon temps en dégueulis et jérémiades. »

Cette fille était vraiment à côté de la plaque et elle ne méritait qu’une chose : que tu lui balances à la gueule les révélations que Harper t’avait faite le soir de sa disparition, au sujet de Julian. Ni plus, ni moins. Il n’y avait rien à sauver chez cette fille, vraiment rien. Et tu doutais un jour de parvenir à comprendre ce que ton frère lui trouvait. Mais tu peinais à comprendre ce qu’il se passait dans la tête de ton frère depuis bien longtemps déjà. Tu n’étais plus à une étrangeté près, même si Brionny était clairement la plus grosse de toute. Tu la regardes, tes yeux suintant le dégoût.

« T’es gentille, on parle d’une machine à café professionnelle à pression et qui fonctionnent avec des grains de café, une machine complexe à plusieurs milliers de dollars, pas le truc en plastique que t’as payé 10$ chez Walmart et qui trônes sur ton plan de travail en faux marbre. Alors excuse-moi de ne pas être barista et contrairement à toi, je ne prétends pas être ce que je ne suis pas. Mon personnel en revanche est professionnel, ils se débrouilleront très bien sans toi alors vire-toi ton cul de ce tabouret, et bon vent. »

Avec un dernier sourire tout aussi hypocrite, tu lui prends sa tasse des mains et attends qu’elle fiche le camp, avant que la tentation ne soit trop forte de lui balancer le breuvage au visage. Tu n’as qu’une hâte, que tu puisses te remettre au boulot sans cette emmerdeuse dans les pattes. Vraiment, ton frère avait sans doute plus de mérite que tu ne lui en accordais à coup sûr. Pourvu qu’ils rompent bientôt…

T'écoutes très vaguement Kenna, elle te gonfle, franchement, blablabli, blablabla, moi je suis professionnelle et toi t'es nulle nianiania, ça n'a aucun intérêt, elle brasse du vent, t'as vraiment envie de te tirer et elle semble t'amener vers cette direction là, ce qui te va totalement parce que passer plus de temps avec elle t'ennuie. Tu te dis que tout ça c'est de sa faute, tout aurait pu très bien se passer si elle ne s'était pas fait un film sur ta potentielle grossesse et si elle n'avait pas voulu te donner des conseils. Elle qui disait pouvoir faire preuve de discrétion, elle n'avait fait que remettre le sujet sur la table, et le coup de l'avortement alors là, c'était le pompon, franchement. Tu roules des yeux, t'es franchement pas atteinte par ses remarques de merde de gamine riche qui se croit mieux que tout le monde "faux marbre", "machine à café Walmart", elle a vraiment un putain de souci à se croire supérieur à tout le monde. Toi t'as rien contre le faux marbre ou Walmart, tu t'en fous, les gens achètent bien ce qu'ils veulent non ? Avec les moyens qu'ils ont. Ah mais non, ça Kenna ne peut pas le comprendre.
Tu soupires alors qu'elle te prend la tasse de café des mains, t'invitant à partir. Tu la regardes un moment, tu pinces les lèvres, t'as vraiment envie de lui dire qu'elle agit comme une gamine depuis le début, mais tu sais que ça ne sert à rien. Elle est trop persuadée d'avoir raison. Tu te baisses pour ramasser ton sac :
- Franchement, Kenna, c'est ridicule tout ça, je pensais qu'on allait peut-être pouvoir s'entendre, mais t'as fait que rabâcher cette histoire de nausée matinale alors que tu voyais très bien que je ne voulais pas en parler, mais ça t'a pas empêcher de continuer, de me foutre bien mal à l'aise en me parlant d'avortement... On a vu mieux niveau bienveillance et discrétion...
Tu jettes un coup d'oeil à ta montre avant d'ajouter :
- Bref, c'est effectivement mieux que je te laisse travailler, t'as encore du boulot, et moi j'ai aussi mieux à faire que de me disputer bêtement avec toi... J'espère quand même que ta soirée va bien se passer.
T'es pas foncièrement mauvaise Brionny, t'as pas envie de continuer de te battre avec elle, ça te fatigue plus qu'autre chose en fait, t'es presque contente de lui avoir dit ce que tu pensais, que ça t'avais gêné de parler de tout ça, que t'aurais préféré qu'elle ne dise rien alors que t'étais déjà suffisamment mal dans ton corps. Tu t'éloignes tranquillement pour rejoindre ta voiture, t'es pas prête de remettre ça avec elle, en tout cas.